La cacherouth

Un dossier préparé par K. Acher
Pour une lecture plein écran, ouvrez http://www.kacher.fr   dans votre navigateur.
Mise à jour le

 

Une longue vie… cachère

A l’âge de huit ans, Reb Mendel Futerfass mérita d’entrer en Ye’hidout (entrevue privée) auprès de Rabbi Chalom Dov Ber. Ce fut l’épouse du Rabbi, la Rabbanite Shterna Sarah, qui l’introduisit :

- C’est le petit-fils de Ra’hel Léa ! Il porte le prénom de son père ! (Reb Mendel était né après la mort de son père et portait donc son prénom : Mena’hem Mendel fils de Mena’hem Mendel… Sa grand-mère était une amie de la Rabbanite).

Rabbi Chalom Dov Ber le regarda de la tête aux pieds et le bénit :

- Sois un Juif craignant D.ieu et tu mériteras une longue vie !

Effectivement, par la suite, Reb Mendel vécut à la hauteur de cette bénédiction. Condamné à être déporté dans les camps de travail en Sibérie pour 25 ans, il souffrit de la faim à tel point que tout son corps était enflé par la faim. On rassembla tous ces malades en phase terminale pour lesquels on ne prévoyait pas qu’ils survivraient. Lui aussi fut emmené, on lui enleva même ses vêtements et c’est ainsi qu’il gisait recouvert d’un drap avec d’autres malades dont on attendait la mort imminente. Une pensée fulgurante lui traversa alors l’esprit :

- Est-ce cela une longue vie ?

Et il survécut...

- Dans ces montagnes d’obscurité, raconta-t-il plus tard, j’avais deux problèmes : la cacherout et le Chabbat. De fait, la cacherout ne posait pas vraiment de problème puisqu’il n’y avait rien à manger. Quant au Chabbat, dès le début j’annonçais que, quoi qu’il arrive, je ne travaillerai pas Chabbat et, effectivement, je n’ai jamais travaillé ce jour !

Un jour, alors que la faim était effroyable dans tout le camp, il y eut soudain un arrivage de nourriture : des poissons. Et c’était des poissons cachères ! (Avec écailles et nageoires !). Cependant, Reb Mendel remarqua que les tonneaux étaient huilés et il était possible que l’huile ne soit pas cachère.

Reb Mendel se mit alors à réfléchir et à élaborer intérieurement un discours talmudique savant : «Voyons… L’huile qui enduit les tonneaux peut être considérée comme Batel Bechichim (annulée par un soixantième par rapport à l’aliment cachère). De plus, nous sommes dans une période de famine et c’est une question de vie ou de son contraire… ce qui repousse pratiquement toutes les interdictions de la Torah. Mais, par ailleurs, l’huile peut être considérée comme Davar Hamaamid, l’élément qui permet à l’aliment de rester mangeable et, dans ce cas, la loi est que Davar Hamaamid n’est pas annulé, même si la quantité est infime…».

Mais s’il ne mangeait pas, il mourrait, D.ieu préserve ! Or, celui qui met sciemment fin à sa vie n’a pas de part dans le Monde Futur !

C’est alors que Reb Mendel se souvint de l’histoire connue à propos de Rabbi Chnéour Zalman : quand celui-ci avait été emprisonné, on voulut lui faire avaler de force des aliments interdits. Il s’y opposa. Le gardien lui fit remarquer que, s’il ne mangeait pas, il mettrait de lui-même fin à sa vie et n’aurait pas de part dans le Monde Futur ! Rabbi Chnéour Zalman avait alors répondu : «Je préfère ne pas manger Taref et ne pas avoir de part dans le Monde Futur !».

Reb Mendel décida de ne pas manger les poissons !

Puis il réfléchit encore : «Je ne suis pas au degré de Rabbi Chnéour Zalman !» et hésita à nouveau…

- Je ne suis qu’un ‘Hitsoni, quelqu’un qui s’imagine être un ‘Hassid mais, après tout, j’ai reçu une bénédiction de mon Rabbi, Rabbi Chalom Dov Ber que je vivrai longtemps…

Et cet argument l’emporta sur tous les autres !

Reb Mendel concluait : «Je n’ai pas mangé les poissons et j’ai survécu !»

Et il mérita effectivement de survivre et de vivre encore de longues années… Il fut gracié et libéré au bout de huit ans grâce à la mort de Staline. Mais il lui fallut encore plus de dix ans avant qu’il puisse quitter l’Union Soviétique et rejoindre sa femme et ses enfants. Il put alors donner la pleine mesure de ses extraordinaires qualités d’éducateur et influencer des milliers d’élèves de Yechiva.

Reb Chalom Feldman – Kfar Chabad N° 1622

Traduit par Feiga Lubecki,

Sidra de la semaine 5776 N° 6

Un dossier préparé par K. Acher